« Par de nombreuses paraboles Jésus leur annonçait la Parole, dans la mesure où ils étaient capables de l’entendre … »

Aujourd’hui Jésus prend deux paraboles :

-La semence qu’un homme jette en terre qui grandit et se développe, il ne sait comment

-La graine de moutarde, la plus petite de toutes les graines qui devient un arbre dans lequel les oiseaux viennent nicher.

Pour nous, presque tous issus du monde rural ou, tout au moins , proches de la nature , ces paraboles nous parlent bien. Nous avons tous l’expérience des graines mises en terre dans nos jardins ou au moins des fleurs semées sur nos balcons.
Il se trouve aussi que nous pouvons comprendre la comparaison entre la graine et la parole de Dieu qui a été semée en nous, aussi la comparaison entre la graine et les valeurs que nous avons essayé de semer dans les générations qui nous succèdent et qui souvent nous désespèrent tant elles nous semblent infertiles.
Chez nous d’abord : Dans notre éducation, le plus souvent depuis notre plus petite enfance , la parole de Dieu a été semée. Pas seulement de manière théorique mais de façon très concrète et très en lien avec les valeurs évangéliques. Nous n’avons certainement pas mis en pratique tout ce que nous avons reçu mais nous avons découvert très tôt le sens du service et Jésus a dit « le plus grand pour moi c’est celui qui se met au service, selon l’exemple que je vous ai donné ».
De même pour le partage, pour le respect, pour le pardon etc etc …

Sans toujours avoir la théorie, nous avions la pratique par la parole et par l’exemple.  « Le royaume de Dieu est comparable à une graine semée dans un champ »… Ces graines, multipliées par le nombre de personnes qui étaient élevées comme nous, donnaient, en partie une idée du royaume des cieux. Nous avons eu la chance, et je dirai même la grâce, de ne pas être des enfants rois. C’était valable pour manger la soupe, et ça l’était tout autant pour aller à la messe, au catéchisme tout comme pour prendre notre part de travail ou pour respecter l’adulte. Ce mode d’éducation ne semble pas nous avoir traumatisés puisque nous sommes là, sans doute pas rancuniers envers l’éducation que nous ont donné nos parents.
Les graines, des graines d’Evangile ont poussé et donnent encore de beaux fruits.

Une évolution s’est peu à peu installée qui a poussé les parents à négliger le temps des semailles dans la vie de leur petit. Après le « Mon chéri, si tu ne veux pas manger ta soupe, maman te fera une belle tartine au nutella comme tu aimes » a suivi le temps du « Si tu ne veux pas aller au catéchisme ce n’est pas grave, tu choisiras plus tard », même chose pour aller à la messe … Puis d’autres attitudes qui ont conduit le parent à se mettre du côté de l’enfant en opposition à l’adulte chargé de faire l’école ou d’en représenter une autorité et le chérubin a vite compris qu’il pouvait se faire son monde à lui, sans contrainte et sans effort , avec ses idées, ses caprices et les idées véhiculées par sa tablette, son portable et les copains qui avançaient au même pas que lui, tout cela au détriment de ce que l’Evangile, le catéchisme, ou même les parents pourraient suggérer.
On s’étonne qu’aujourd’hui, alors que les chérubins ont grandi au point de porter moustache et d’avoir le droit de vote ils ne donnent pas exactement les fruits espérés. Le respect, le pardon, le sens du service, l’engagement, la vérité, ont été rangés aux oubliettes, au point que l’on peut voir un président se faire gifler sans avoir une réprobation de cette classe d’âge, au point qu’un adolescent peut attenter à la vie de ses copains, au point que la fidélité, le respect de la parole donnée, mais aussi l’entraide, l’attention aux plus fragiles, et même la fierté d’être indépendant grâce à son travail disparaissent parfois, au point encore que des jeunes en âge de procréer ne souhaitent pas avoir d’enfant qui risquerait de déranger leur appétit de loisirs, de voyages etc..

Des parents ont pourtant semé, de leur mieux, mais ils ont semé là où d’autres ne semaient rien et la loi du plus grand nombre a quelque peu étouffé la bonne volonté de certains de nos jeunes. Les graines n’ont pas germé à cause des mauvaises herbes trop envahissantes.

Et les parents se désolent de voir leurs enfants ou leurs petits-enfants suivre un chemin qu’ils n’avaient pas imaginé.
On entend : « mes petits enfants ne sont pas baptisés et pourtant on avait tout fait pour éveiller leurs parents à la foi. » 
Ou encore « Mon petit fils a touché à la drogue, il ne travaille pas, etc etc
qu’est ce qu’on a fait pour mériter ça ? » « à la maison on a toujours travaillé et on était fiers de notre travail et d’avoir gagné ce qu’on a aujourd’hui, mais aujourd’hui les loisirs ont pris la place et ils acceptent tout a fait de vivre de l’assistanat. »
Ou encore, la vie de famille pour nous c’était une valeur majeure, mais je ne vous dis pas ce qui se passe dans la nouvelle génération. »
On peut multiplier les désillusions des parents et surtout des grands parents qui ne comprennent pas ces changements. Ce dont ils sont certains surtout, c’est que ce qu’ils voient ce n’est pas le Royaume de Dieu.

Alors nous nous interrogeons, parents, grands-parents, éducateurs, prêtres : Qu’est-ce que nous n’avons pas fait comme il faut ? Pourquoi les graines que nous avions semées n’ont pas germé ?

D’abord il ne faut pas mettre tous les jeunes dans le même sac : certains excès ne révèlent pas la vie de la majorité de nos jeunes qui sont simplement inquiets de leur avenir et qui sont déroutés autant que nous devant la tournure des évènements qui font un peu trop la une des journaux. D’autre part, des graines ont poussé, peut être différemment de ce que nous avions imaginé : Ainsi des grands parents qui se désolent parce que leur petite fille ne fréquente pas beaucoup les églises, affirment dans le même temps qu’elle passe ses week-end au service des sans-abris de la capitale. Des jeunes de chez nous ont donné cette année un bel exemple du partage , d’autres s’investissent beaucoup dans le respect de la nature et il y a ainsi toute une récolte qui n’était pas programmée dans le logiciel des grands parents. Nos jeunes ont plus besoin d’être écoutés, encouragés, aidés que critiqués.

Enfin il ne nous faut pas oublier les textes de ce dimanche, Ezechiel, et encore on pourrait ajouter d’autres paraboles de Jésus, notamment celle du semeur qui laisse tomber ses graines sur le chemin, dans les épines, dans les cailloux mais aussi dans la bonne terre qui donne du fruit jusqu’à cent pour un. Ou encore la parabole du grain qui met longtemps à donner du fruit. Jésus nous parle de la patience du semeur qui accepte qu’il faille du temps pour que les semailles donnent du fruit, celle qui nous dit qu’une bonne graine semée ne pourra pas donner des fruits mauvais.

Aujourd’hui dans notre volonté de construire ce Royaume de Dieu dont nous parle Jésus, il nous faut demander son aide, lui qui fait refleurir l’arbre mort, il nous faut lui demander la grâce de la bienveillance, de la patience de la fidélité dans notre témoignage et aussi la grâce de l’optimisme.

Père Joseph Valentin