Dimanche 14 Mars 20121 : C’est par grâce que vous êtes sauvés.
Une équipe de fidèles a bien voulu prendre du temps mercredi matin à la chapelle paroissiale pour lire ces textes et essayer d’entrer un peu plus avant dans leur message. Je les en remercie et notre dialogue m’a permis d’entendre les questions, mais aussi les compréhensions différentes de la liturgie de ce dimanche.
Sur la première lecture nous pouvons avoir la synthèse suivante :
Ces textes ne sont pas une rédaction historique des évènements, ils sont écrits parfois très longtemps après les évènements et, placés en face de la foi du moment ils deviennent une relecture de ce qui s’est passé.
A savoir :
Dieu fait alliance et son peuple n’est pas fidèle à cette alliance. Dieu est patient, il envoie prophètes et messagers pour rappeler l’exigence de son alliance, puis survient la déportation, l’occupation et tous les malheurs liés aux guerres. Puis Dieu se souvient de son alliance, il pardonne, et parfois par l’intermédiaire de païens il redonne ses chances à son peuple et le fait revenir sur ses terres.
Question :
Est-ce Dieu qui punit son peuple ? Est-ce que le malheur qui a frappé ce peuple (70 ans de déportation !!!!) était une punition de Dieu ?
Transposé dans notre propre histoire :
Est-ce que le ou les malheurs qui nous frappent sont une punition de Dieu ? C’est ce que nous suggérons quand nous disons de façon un peu légère : « Qu’Est-ce que j’ai fait au Bon Dieu pour mériter ça ? ». Ce qui ne donne pas une belle image du « BON » Dieu, ou encore une remarque quand nous disons à un enfant « le Bon Dieu t’a puni »
Jésus sera formel dans l’Evangile, devant les questions que suscite le malheur d’un aveugle de naissance « Qui a péché, lui ? ou ses parents » ? il dit très clairement : « ni lui, ni ses parents »
Même chose pour les victimes de la chute d’une tour ou pour les victimes d’un massacre perpétré par les romains : « Ils n’étaient pas de plus grands pécheurs que les autres »
Et puis quand dans une catastrophe il y a des enfants, mettre cette catastrophe sur le dos du Bon Dieu c’est lui faire un procès douteux et irrespectueux, tant les enfants ne peuvent être responsables du malheur.
Parfois, c’est vrai, les hommes sont responsables collectivement de telle ou telle catastrophe, de telle ou telle guerre, de telle ou telle pandémie, de telle ou telle négligence écologique qui conduisent au malheur. Ce n’est pas Dieu le responsable, c’est chacun de nous, solidaires du bien dans l’humanité et solidaires du mal.
Parfois c’est simplement la nature imparfaite que nous devons apprendre à maîtriser. Dans un des livres sapientiaux de la Bible, l’auteur écrit que, dans la nature il y a à la fois le poison et le remède, je crois bien que c’est la même chose dans le cœur de l’homme.
La deuxième lecture de St Paul nous a aussi interrogés, surtout quand il écrit : « Dieu est riche en miséricorde, à cause du grand amour dont il nous aime. C’est par grâce que vous êtes sauvés (2 fois) et par le moyen de la foi. Cela ne vient pas de vous, cela ne vient pas de vos actes, c’est le don de Dieu ! »
Les gens à qui Paul s’adresse sont juifs, ils pensent qu’ils auront accès à la vie éternelle par une obéissance stricte à la loi donnée par Moïse. Quand ils n’arrivent pas à réaliser parfaitement cette loi ils font des rites de purification et quand ils arrivent à bien vivre ces principes, ils bombent le torse et méprisent tous ceux dont la vie est marquée par des comportements indignes : collecteurs d’impôts, prostituées, voleurs brigands ou, tout simplement étrangers non juifs. On se souvient de la parabole du pharisien et du publicain.
Dans son enseignement Jésus vient battre en brèche ces comportements. D’ailleurs qui pourrait mériter le salut, qui pourrait mériter d’être sauvé ? Il faudrait bien être prétentieux pour cela. Jésus nous dit que le salut est un don de Dieu ; c’est écrit deux fois dans ce texte : « cela ne vient pas de vous, c’est un don de Dieu, cela ne vient pas de vos actes… » D’ailleurs les premiers à faire cette expérience du pardon du Christ ce ne sont pas des piliers de cathédrale, ce sont un malfaiteur, celui que l’on appelle le bon larron, « aujourd’hui même tu seras avec moi en paradis », c’est une femme qui a eu 7 maris, (la samaritaine) une autre Marie Madeleine, les apôtres qui ont renié, trahi, fui, déserté au calvaire : « la paix soit avec vous », et bien sur tous ceux qui ont mis le christ en croix depuis les pharisiens jusqu’à Pilate qui s’en lave les mains, jusqu’à ceux qui ont tourné leur veste … et nous les héritiers des uns et des autres : « Père pardonne leur, ils ne savent pas ce qu’ils font »
La grande question c’est que, si nous ne sommes pas sauvés par nos actes, à quoi ça sert d’essayer de vivre au plus près de l’Evangile ? J’aimerais répondre que c’est d’abord de vivre comme bien des gens qui ne sont pas croyants, qui n’attendent aucune récompense mais qui donnent de leur temps, de leur argent de leur santé, de leur bienveillance de leur charité pour que le monde soit meilleur.
Sans vouloir prétendre à être meilleur qu’eux, on peut se donner l’exigence, à cause de notre foi, d’essayer de faire autant qu’eux. Ensuite quand on regarde le Christ, quand on découvre comment il nous a manifesté son amour, on éprouve le besoin de nous rapprocher de lui et de vivre de sa vie.
Même si nos actes ne nous sauvent pas, même si les pécheurs sont sauvés autant que nous, notre amour du Christ nous incite à l’imiter. Dieu nous a aimés et nous aime gratuitement, nous recevons tout de lui, la vie, le monde, la foi, tout est cadeau, alors essayons d’aimer gratuitement.
Enfin une dernière raison, c’est que vivre l’Evangile ça ne rend pas malheureux, bien au contraire : Le Christ dit : « celui qui garde sa vie pour lui la perdra, vivre c’est donner sa vie » et il est certain que de ne vivre que pour soi, ça rend malheureux. L’Evangile est source de joie et source de sens.
Dans le texte d’Evangile se dessine l’image de la croix et des jours à venir où nous allons célébrer notre délivrance, accueillir ce salut qui nous est offert et, humblement venir nous incliner devant la croix pour reconnaître qu’aucun de nous ne mérite d’être sauvé, remercier Dieu pour son fils et le salut qu’il nous offre.
Le texte nous dit : « Dieu a tellement aimé le monde qu’il a donné son fils, non pas pour juger le monde, mais pour que, par lui, le monde soit sauvé. Dieu a tellement aimé le monde qu’il a donné son fils unique afin que quiconque qui croit en Lui obtienne la vie éternelle. »
Dieu n’a pas attendu que nous soyons parfaits pour nous aimer, il n’attend pas non plus que nous soyons parfaits pour nous sauver, il attend juste que nous ayons l’humilité de croire que nous ne pouvons pas nous sauver tout seul, il attend juste que nous ayons l’humilité d’accepter son aide pour réussir notre vie.
Alors, le vendredi saint, humblement nous viendrons nous incliner devant la croix et nous viendrons accueillir le pardon qui nous est offert, non pas à cause de nos grandes qualités, mais simplement par amour gratuit de notre Dieu.
Père Jo Valentin