Ce dimanche était connu sous le nom latin de « gaudéamini » « réjouissez-vous » Le vêtement liturgique devrait être rose, (pour l’unique fois dans l’année.) Mais nous n’avons pas cette couleur à la sacristie. Par contre les termes de la liturgie nous centrent bien sur la joie :

« L’esprit du Seigneur est sur moi parce que le Seigneur m’a consacré par l’onction, il m’a envoyé annoncer la bonne nouvelle aux pauvres, guérir ceux qui ont le cœur brisé, proclamer une année de bienfaits de la part du Seigneur… Je trésaille de joie … » Première lecture du prophète Isaïe

« Mon âme exalte le Seigneur, exulte mon esprit en Dieu mon sauveur » C’est le psaume, le chant du Magnificat de Marie

« Frères, soyez toujours dans la joie » C’est l’invitation de saint Paul, dans la deuxième lecture.

Enfin c’est le témoignage de Jean baptiste dans l’Evangile de ce jour, un peu comme dimanche dernier qui commence par ces mots « Jean n’était pas la lumière, mais il était là pour rendre témoignage à la lumière… »

Le premier texte d’Isaïe nous l’entendons au jour où Jésus entre dans la synagogue de Nazareth : Jésus lit ce passage, (qui introduisait aux jubilés tous les 50 ans) et déclare : « Cette parole, c’est aujourd’hui qu’elle s’accomplit » La venue de Jésus est bien la cause de cette joie annoncée par Isaïe, tout comme elle doit être la raison de notre propre joie. Notre joie n’a rien à voir avec le Père Noël, les réveillons à 6 ou à 8 , les fêtes païennes, nous sommes dans la joie parce que le Seigneur vient « demeurer, habiter chez nous »

La lumière ? Nous en manquons cruellement en ces jours de l’année qui sont les plus courts, les plus sombres, les plus froids, mais nous savons qu’au lendemain de Noël la lumière des jours commencera à gagner sur la nuit et cela suffit à nous redonner de l’espoir nous allons chaque jour vers du mieux. Cela symbolise aussi notre attente du jour de Dieu « comme un veilleur attend l’aurore » : Nous sommes certains que cette lumière viendra même si nous sommes (le monde et aussi chacun de nous) au creux de la nuit. Mais ce n’est pas en plein soleil qu’il faut croire en la lumière, c’est toujours au creux de la nuit, même si elle est longue et noire.

La joie ? C’est comme la lumière, Elle n’est pas vraiment dans nos têtes ni dans nos cœurs « avec tout ce qui se passe ! » notre temps est plutôt à la déprime, à la solitude, à la peur de l’avenir … Comment entendre ces textes de la parole de Dieu en ce dimanche de « gaudéamini »

Nous faisons tous des expériences de joie : Joies toutes simples, celles que les braves gens déclinent quand on leur demande « Comment ça va ? » et qu’ils répondent : « ça va ! Du moment qu’on peut se lever le matin ! » C’est vrai que nous ne pensons pas beaucoup à remercier le Seigneur pour toutes ces petites joies quotidiennes que pourtant bien des gens pourraient nous envier : la santé, la famille, les amis, les rencontres. Il y a toutes ces petites joies de chaque jour, dans notre environnement, mais aussi dans ce qui se vit autour de nous : La télévision ne nous parle que des choses qui ne vont pas bien et pourtant il y a tant et tant de petites belles choses dans la vie des gens !

Et puis il y a des joies plus profondes, celles qui nous font vivre : les enfants, les petits enfants, les engagements, les projets à long terme qui ont réussi … Cette semaine une petite fille qui est en CM1 disait dans sa classe : « Mes parents ne sont pas bien riches, mais mon plus beau cadeau c’est que j’ai eu deux petites sœurs » La vérité sort souvent du cœur des enfants !
Nous aussi, nous avons des joies profondes qui irriguent nos journées, qui font que le soir, et même le soir de note vie, on peut dire comme dans le psaume : « en paix je me couche et je dors, maintenant au maitre souverain tu peux laisser ton serviteur s’en aller en paix selon ta parole » comme le dit le vieux Siméon, ou encore st Jean qui écrit : « notre cœur aurait beau nous accuser, Dieu est plus grand que notre cœur et il connait toute chose » autrement dit : quand on a fait ce que l’on pensait bien, il faut accepter que tout ne se passe pas selon nos plans …
Quand tout coule de source, cela nous parait tellement normal que nous ne pensons pas souvent à en dire merci au Seigneur… Et puis, quand nous connaissons l’échec , dans l’éducation de nos jeunes, dans leur manque de foi, dans leurs comportements qui nous déroutent parfois, comme dans l’échec de nos projets, nous oublions tout le reste, toutes les beautés qui nous font vivre, comme si tout devait toujours bien marcher , alors que les évènements, l’ambiance du moment, l’usage de la liberté, perturbent régulièrement ces trajectoires toutes droites que nous avions imaginées et nous perdons notre joie, nous devenons tristes, comme si tout était de notre faute, comme si nous avions pouvoir sur tout, aujourd’hui, demain et pour longtemps encore.
Une dernière chose enfin, il y a parfois des échecs à court terme qui peuvent devenir des chances pour longtemps après : ainsi, un ancien maire de Monistrol m’a dit un jour : heureusement que j’ai été prisonnier de guerre, sinon j’aurais raté ma vie : c’est là que j’ai réfléchi … Comme lui, parfois nous ne voyons les choses que longtemps après

Au temps où Isaïe, un peu à la manière de Martin Luther King , prononce son rêve d’un monde où le loup mangerait avec l’agneau, les choses n’allaient pas vraiment bien dans son peuple et l’exil se profilait, quand Marie exulte de joie dans son magnificat, les choses ne sont pas simples pour elle, fille mère, et ce n’est que le début ; quand les anges dans nos campagnes entament le gloria dans la nuit de Bethléem, ça n’est pas vraiment l’euphorie : un recensement aussi compliqué que les dé confinements, pas de place pour un jeune couple éreinté et un monarque qui veut tuer tous les enfants… et pourtant l’ange trompette «Ne craignez pas, voici que  je vous annonce une bonne nouvelle, une grande joie pour tout le peuple : aujourd’hui, dans la ville de David, vous est né un sauveur » Et St Jean nous dira dans son Evangile du 25 décembre : »En lui était la vie et la vie était la lumière des hommes, la lumière brille dans les ténèbres et les ténèbres ne l’ont pas arrêtée. »

Aujourd’hui non plus il ne faut pas que les ténèbres arrêtent la lumière, aujourd’hui non plus il ne faut pas que les évènements étouffent notre joie, celle qui nous est au cœur, plus forte que nos échecs, et que nos malheurs, nous ne sommes plus seuls et la lumière sera toujours plus forte que nos nuits , alors j’ai envie de chanter avec le poète jacques Brel :La lumière jaillira claire et blanche un matin, brusquement devant moi quelque part en chemin , la lumière jaillira et la reconnaitrai pour l’avoir tant de fois, chaque jour espérée, la lumière jaillira et de la voir si belle, je connaitrai pourquoi j’avais tant besoin d’elle et je l’inviterai à venir sous mon toit pour y tout transformer…

Seigneur donne nous la lumière !

Seigneur Donne nous la joie !