Dieu appelle, depuis toujours, c’est une constante dans toute la Bible. C’est une constante dans toute l’histoire de l’Église. C’est donc une réalité aujourd’hui et cet appel retentit dans une période où il ne semble pas beaucoup trouver d’écho, encore plus en ce temps de pandémie qui résonne parfois comme un temps de démobilisation …
Plus que jamais nous devons nous rappeler combien Dieu veut avoir besoin des hommes pour que son règne vienne.
Plus que jamais nous devons prier pour les vocations.
Plus que jamais nous devons nous interroger sur le comment nous répondons à notre vocation de baptisés « prêtres, prophètes et rois »

Dans les textes proposés par la liturgie de ce dimanche, nous découvrons comment Dieu a voulu avoir besoin des hommes pour relayer son message.
C’est d’abord le jeune Samuel un peu plus de 1000 ans avant Jésus. Samuel est, comme d’autres, mis à part dès avant sa naissance, puisque sa maman « Anne » stérile, a vu sa prière récompensée par l’annonce de cet enfant. Elle le consacre au Seigneur et c’est pour cela que nous le retrouvons tout jeune, dans le temple de Silo (qui précède celui de Jérusalem) au service du prêtre Eli. Samuel pourrait être le patron des enfants de chœur !
Dieu appelle Samuel, mais c’est le vieux prêtre Eli qui discerne cet appel et qui conseille à l’enfant de répondre : « Parle Seigneur, ton serviteur écoute », une prière que nous pourrions répéter souvent.
Eli aura été un relais dans la vocation de Samuel qui, lui-même sera à l’origine d’autres vocations telle que celle du roi Saül et surtout du roi David.

Dans l’Evangile de ce jour Dieu appelle encore. Il a besoin d’abord de Jean Baptiste, qui montre Jésus aux futurs apôtres : « Voici l’agneau de Dieu ». Le Baptiste voit Jésus qui « va et vient » nous dit le texte. On sait par d’autres passages que Jean Baptiste n’a pas discerné du premier coup qui était son cousin.
Jésus va et vient, pour Jean baptiste, comme pour nous, nous avons des moments de proximité avec lui, puis des moments moins évidents : Jésus va et vient dans notre histoire. Nous avons besoin que quelqu’un nous le montre, nous le fasse découvrir, attentif à l’instant favorable pour nous.
Les deux disciples, dont l’un sera l’Apôtre André, demandent à Jésus « où demeures tu ?» c’est un écho à la nuit de Noël où Jean nous a dit « il est venu demeurer chez nous ».
Ce n’est pas une histoire d’adresse, c’est une question qui demande : « Qui es-tu Jésus ? »
Et Jésus ne donne pas une adresse, il dit : « venez et vous verrez »,
Il faut peut-être comprendre que pour connaître Jésus, il faut le côtoyer dans l’Evangile, voir et comprendre son message, pas une histoire de connaissance, une histoire de relation intime .
Nous n’avons pas besoin de théoriciens de l’Evangile, nous avons besoin de pratiquants de l’Evangile. Le résultat n’est pas tout de suite probant « il est environ 4 heures de l’après midi ».
Nous savons bien que, quand St Jean nous donne l’heure, il ne regarde pas sa montre, mais l’heure de la foi ; ( Quand la samaritaine découvre la foi il nous dit « il est midi » ; quand Nicodème se pose des questions sur naître et renaître il nous dit « il faisait nuit », quand Judas trahit, même chose, il faisait nuit.)
Là il est 4 heures, autrement dit, ce n’est pas tout à fait évident pour eux. Mais n’attendons pas d’être au sommet de nos convictions pour oser appeler les autres, en effet André, en recherche de réponses à sa propre foi, n’hésite pas à appeler son propre frère, Simon, à qui Jésus donne un nom, j’allais dire de baptême : « Képhas » ce qui pourrait se traduire par « tête dure ».

Ainsi va l’histoire des vocations. Dieu appelle à travers une personne, cet appel nous met en route, même de façon imparfaite, et nous osons en appeler d’autres après nous, pour une vocation chrétienne, qu’elle prenne telle ou telle forme. Ainsi cette semaine je rencontrais une mamie, pas très en forme, qui me disait voir sa descendance s’agrandir avec une nouvelle naissance et elle ajoutait : « j’attends le bon moment pour leur dire de faire baptiser ce bébé, ils seraient capables de ne pas y penser ». Pour elle c’est tellement important. Pour ces jeunes parents, ce ne sera pas une demande formelle, mais bien une réponse à l’appel d’un témoin qui rayonne sa foi, tout comme le vieux prêtre Eli ou Jean le Baptiste.

Quand on parle de l’appel des Apôtres, comme aujourd’hui, on pense presque exclusivement à la vocation sacerdotale et religieuse, oubliant la vocation de tout baptisé à être prêtre, prophète et roi. C’est bien à cette vocation qu’il nous faudrait d’abord penser, mais accordons-nous un petit temps pour réfléchir à la vocation sacerdotale.
Là St Jean nous ne nous dirait pas qu’il est 4 heure de l’après-midi, mais plutôt 7 heures du soir, tant il fait sombre.
L’annuaire diocésain nous renseigne sur les forces en présence, Cent prêtres présents actuellement sur le diocèse du Puy dont plus de la moitié a dépassé l’âge de la retraite fixée, (comme pour chacun d’entre vous, dites-moi si je me trompe), à 75 ans, et 16 ont moins de 65 ans, dont 3 moins de 40 ans. Cet effectif comprend bien entendu, les confrères venus d’Afrique, de Madagascar, du Viêt-Nam et d’ailleurs.
Je pense avec nostalgie à mes vertes années. Quand je suis rentré au séminaire nous étions 43 !
Plus inquiétant encore, nous avions, il y a un an encore 4 séminaristes, en bonne marche vers le sacerdoce, les 4 ont mis un terme à leur formation, un nouveau est entré en première année, si Dieu le veut, dans 7 ans il pourrait être ordonné. Dans ce contexte nos jeunes prêtres sont, à juste titre, un peu timorés, un peu seuls, perdus dans ce monde pour lequel leur vocation n’a pas, ou si peu, de place.
D’autres, pourtant aguerris et courageux quittent le navire par découragement ou par solitude, ou bien trouvent des situations plus calmes que l’Evangélisation.
D’autres, et surtout depuis l’arrivée du virus, rentrent dans leur coquille comme les escargots quand il commence à grêler.

Beaucoup, et j’en fais partie, s’interrogent, comme vous, sans doute, sur l’après, non pas l’après dans dix ans ou dans 4 ans, mais l’après dans quelques mois. Bien sur j’entends bien la demande des fidèles : « On veut un curé ! » et pour beaucoup de gens c’est un droit inaliénable. Mais j’ai envie de répondre par une autre question : « pourquoi faire ? » Si c’est pour ouvrir et fermer l’église et uniquement pour célébrer TOUS les enterrements, je comprends bien qu’ils n’auront jamais le bon curé, à moins de le fabriquer sur mesure ou de cloner un des anciens à l’époque où « on avait de bons prêtres ».

Pourtant, s’il propose toute une palette d’engagements à ses paroissiens pour prendre en charge l’avenir de leur communauté sans obtenir de réponse de la grosse majorité d’entre eux, s’il propose une mission pour attirer davantage de jeunes familles au sein de la communauté sans trouver ni enthousiasme, ni réponse chez la majorité d’entre eux, je peux comprendre que ce curé n’ait pas trouvé exactement la place qu’il recherchait et que donc il n’était pas le bon curé adapté à la demande des paroissiens.
Bien sûr je ne parle pas à celles et ceux qui ont mis la main à la charrue.

Mais aujourd’hui, même si c’est quatre heure de l’après-midi ou encore beaucoup plus tard et qu’il ne fait pas très clair dans l’avenir de nos communautés, je me dois de réitérer l’appel du maître et de demander à ceux et celles qui, comme l’apôtre André ont vu Jésus aller et venir dans leur vie, de relayer l’appel qu’ils ont eux même entendu : « venez et vous verrez » et d’oser, comme lui, amener le frère au Seigneur et à son Eglise.

Dans les semaines à venir il y aura des appels, des invitations, à rejoindre la vie de la communauté. Certainement que certains d’entre vous oserons reprendre la prière du jeune Samuel : « Parle Seigneur, ton serviteur écoute »

Père Jo Valentin