Homélie des rois 2 Janvier 2022
Seigneur aujourd’hui trois personnages sortent de la nuit des temps, « Ils viennent de loin, de l’Orient » nous dit Saint Matthieu, ils apportent leur offrande au roi des rois, ils suivent une étoile, ce qui est bien compliqué à faire, ils évitent quelques pièges de la route tendus par les puissants du moment, Hérode et ses comparses, ils s’inclinent devant le roi des rois, le Fils du Très haut, le Christ mort et ressuscité. C’est, m’a-t-on dit le sens de leurs surprenants présents.
Après t’avoir rencontré ils repartent par un autre chemin.
Seigneur je ne peux pas lire ce récit comme une pièce historique, un fait qui se serait déroulé exactement comme il est raconté et qui n’aurait pas d’écho dans ma vie d’aujourd’hui.
Non c’est une catéchèse, ou plutôt une méditation qu’il m’est donné de faire.
Comme eux un jour je me suis mis en route. Je n’avais rien demandé puisque je n’existais pas encore, à moins d’exister déjà, dès avant ma conception, dans le cœur et le projet de Dieu.
Comme le dit la Bible au chapitre 1er du livre de Jérémie « Avant que tes reins ne soient formés je te connaissais dit Dieu, je t’avais mis à part pour me servir avant que tu sois né » .
Je Te remercie mon Dieu de n’être pas le fruit du hasard et encore moins le fruit du néant, mais d’être dans le projet que Tu as pour chacun de nous et pour tout homme. Je te remercie aussi pour les bonnes bases que j’ai reçues dès ma naissance, mes parents, ma famille, une terre accueillante et nourricière car j’aurais pu naître ailleurs, en Afghanistan par exemple et j’imagine maintenant ce qu’aurait été ma vie.
Je me suis mis en route au milieu des autres hommes, fragile comme eux, mais soutenu et accompagné par eux. Les mages ont suivi leur étoile, et moi j’ai suivi les miennes, celles qui m’ont guidé dans la vie, vers l’émerveillement de la nature, vers les valeurs de ce monde rude au travail, fidèle en affection, solide en convictions, croyants parfois maladroitement mais profondément. Ces étoiles m’ont guidé avant même que d’autres ne prennent le relai, par leur enseignement, par leur éducation, par leur volonté de m’aider à grandir en humanité et dans ma foi.
C’était une époque où on ne s’embarrassait pas du Workisme, ces théories fumeuses du genre, ces négations de ce que nous sommes génétiquement, ces perversions de la pensée et de l’être profond.
Merci Seigneur de m’avoir donné d’échapper à ces écarts de la culture. Merci d’avoir mis autour de moi des témoins, des maîtres à vivre et à penser qui m’ont guidé pas à pas vers toi.
Parfois Seigneur j’ai perdu de vue les étoiles que tu avais mises sur le ciel de ma route et je me suis égaré sur des chemins qui m’éloignaient de Toi et aussi de la vraie vie avec mes frères.
Pardon Seigneur d’avoir préféré les ténèbres à la lumière. Des hommes au cœur droit, des prophètes sans doute ont su me remettre sur le chemin de Ta rencontre tout en respectant ma liberté. Où en serais-je aujourd’hui sans eux ?
Mais me voilà maintenant en ta présence, Toi le roi des rois, le maître et le Seigneur, la lumière au-delà de toute lumière. Je dis ces mots Seigneur, parce qu’ils sont écrits dans l’Evangile, mais je n’ai pas fini d’en connaître le sens, et humblement je Te demande de me préserver de les perdre de vue car sans Toi ma vie se viderait de son sens. J’apporte mes présents comme les mages : de l’or, de l’encens et de la Myrrhe.
Dire que j’ai de l’or dans les mains, ce serait bien prétentieux Seigneur, mais j’ai deux mains qui fonctionnent, qui savent se tendre et servir, qui savent planter et offrir. Je voudrais les mettre à Ton service comme celles de ce Jésus qui tendait la main aux fatigués de son temps, qui rompait le pain, qui lavait les pieds de ses disciples.
Les mains ouvertes devant Toi Seigneur pour t’offrir le monde, les mains ouvertes devant toi notre joie est profonde, garde nous tout petits devant ta face, simples et purs comme un ruisseau, garde nous tout petits devant nos frères et disponibles comme une eau.
Comme les mages Je voudrais t’offrir aussi un peu de l’encens de ma prière. Oh ce n’est pas de la bonne qualité et quand la fumée de mon encens monte devant toi elle est toujours polluée par quelque distraction, quelque pensée bassement matérielle, quelque poule à traire quelque part.
Pardon Seigneur, comme les apôtres je te dis « apprends-moi à prier » !
Heureusement il y a les autres, tous les autres, ma communauté, mes frères, les priants de ce monde, ils m’aident à chanter, à célébrer, à me recueillir.
Merci Seigneur. Ne me laisse pas seul pour prier, je vais m’endormir comme tes amis au jardin des oliviers.
Comme les mages je voudrais t’offrir la myrrhe, cet onguent qui dit ta mort et ta résurrection. Tu as voulu que je célèbre ta résurrection en donnant les sacrements, les signes de Ta présence de ressuscité : le baptême, le pardon, l’eucharistie, le sacrement des malades.
Merci Seigneur pour cette confiance que tu m’as faite : Je n’en suis pas digne ; d’autres étaient et sont beaucoup plus dignes que moi, mais puisque ton Eglise m’a appelé en ton nom, donne-moi de toujours célébrer dans le respect, dans le sens du sacré, dans l’humilité de laisser l’Esprit Saint venir lui-même à travers mes pauvres mots et mes pauvres gestes.
J’ai de la chance Seigneur, j’ai plus de cadeaux que les mages ! Je voudrais t’offrir la vie de ma communauté. J’y découvre des choses merveilleuses que je ne peux pas dire à ce micro, car ils en seraient trop fiers et croiraient qu’ils sont meilleurs que d’autres. Mais Tu les connais Seigneur et depuis le sourire de l’enfant jusqu’à la main ridée du vieillard, tu sais bien tous les trésors qui se cachent dans le cœur de chacun.
Je te demande pour eux et pour moi la grâce de l’espérance, de la confiance.
A ton époque à Bethléem il y avait les romains qui empoisonnaient la vie des gens, aujourd’hui il y a ce virus qui nous fait mal, qui nous fait peur, qui nous divise, qui asphyxie nos relations sociales, qui nous monte les uns contre les autres. Tu as jadis calmé la tempête et il s’est fait un grand calme, parle donc au vent et à la mer pour que, aujourd’hui encore il sa fasse un grand calme. J’ai tellement d’autres chose à Te dire Seigneur, petit enfant de la crèche ou roi des rois, mais mes paroissiens n’ont pas reçu beaucoup de patience en cadeau et ils vont trouver le temps trop long.
Alors ils sauront Te dire aussi tellement de choses de leur vie, de leurs soucis qu’ils se font pour leurs malades, pour leurs enfants.
Je leur laisse la parole Seigneur, ou la prière silencieuse.
Tu nous dis que les mages sont partis par un autre chemin, alors Seigneur s’il nous arrive de prendre les chemins de traverse pendant l’année qui vient, donne-nous à tous et à chacun de trouver un autre chemin pour revenir vers Toi Amen.
Père Joseph Valentin